
« Handi-Gang », Cara Zina
Certes, « Handi-Gang » est un roman. Utopique, diront certain·es. Pourtant, les situations qui constituent la trame de cette histoire ont toutes été vécues par l’autrice, son fils ou des proches. Mère d’un enfant en fauteuil roulant, enseignante depuis vingt ans à Nancy où elle accueille des publics très variés, Cara Zina a également des ami·es sourd·es et aveugles. Elle connaît donc les difficultés qu’iels rencontrent dans leur quotidien, dès lors qu’iels doivent se déplacer, entrer dans un bâtiment, travailler, aller à l’école, se divertir… vivre, en somme.
Ainsi, l’histoire de « Handi-Gang » est en partie autobiographique. Elle raconte le parcours de Sam, jeune paralysé en fauteuil roulant, qui décide, avec un groupe d’ami·es également handicapé·es, de militer concrètement pour une société inclusive. Leur principe ? Tant que les lieux publics ne seront pas accessibles aux personnes en situation de handicap, ils ne le seront plus pour personne ! Et de murer, bloquer, boycotter, empêcher l’accès desdits lieux.
« Depuis toujours, on nous méprise, on nous ignore : le monde appartient aux valides. Il va falloir désormais compter avec nous, écrivent-iels dans leur premier communiqué revendicatif. Nous que vous ignorez, que vous contournez et évitez de regarder. Nous, handicapés polymorphes, autistes, sourds, aveugles, IMC ou à mobilité réduite, nous voulons plus de représentations dans les médias, le corps médical, la fonction publique et au gouvernement. Nous exigeons plus de considération et plus d’aménagements. Nous sommes une force vive et il ne faudrait pas l’oublier, sinon on pourrait bien tout faire péter ! »
Bientôt, les médias ne sont plus les seuls à s’intéresser à ce collectif atypique : la police aussi. Car certain·es jeunes choisissent de passer à des actions plus violentes pour obtenir davantage de résultats, plus rapidement. Les débats qui secouent alors le collectif sont récurrents chez les militant·es, qu’iels soient porteur·ses de handicap(s) ou non : quel répertoire d’actions choisir, pour quels résultats, avec quelles conséquences ? Ou placer la limite de la désobéissance civile lorsqu’on remet en question l’ordre établi ?
Découpée en chapitres courts, l’histoire est racontée sur un rythme enlevé. Les lecteur·ices suivent tour à tour le point de vue de Djenna, la mère célibataire de Sam, et celui des membres du Handi-Gang. Si le propos est sérieux, le ton est souvent drôle, particulièrement lorsqu’on entre dans l’intimité de Djenna, complètement dépassée, mais tenant absolument à soutenir le combat de son fils. Son amant, sa meilleure amie, son avocat… Toute la galerie des personnages est réussie et chacun·e offre des niveaux de réflexion enrichissants.
« Handi-Gang » est paru en 2017 aux éditions Libertalia : https://editionslibertalia.com/catalogue/poche/handi-gang
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Dans « Handi-Gang », Cara Zina évoque les « Handicapés Méchants », un groupe constitué dans les années 1970, tout comme le Mouvement de Défense des Handicapés (MDH). Pour en savoir plus : https://www.cairn.info/revue-geneses-2017-2-page-56.htm